Adrien Nguyen, photographe hors cadre
Depuis plusieurs semaines, le mystérieux photographe Adrien Nguyen expose des portraits en noir et blanc directement dans les rues. Des visages, des expressions, des postures… Autant d’images collectées à travers les continents qu’il explore sans relâche. Avec ses mini-expos à ciel ouvert, l’artiste veut faire ressortir la part d’humanité qui réside en chacun de nous.
Il prévient tout de suite : son visage n’apparaîtra pas sur la photo. Joli pied de nez pour un portraitiste. Le jeune trentenaire, chaleureux et souriant, préfère être discret. D’abord parce que ses installations sauvages dans l’espace public flirtent avec les limites de la légalité. Ensuite, parce qu’il désire rester dans l’ombre pour mettre en avant les « autres ». Comprenez : ces femmes et ces hommes rencontrés aux quatre coins du monde (Vietnam, Maroc, Inde, Équateur, etc.) et qu’il a capturé en images.
Adrien Nguyen – de son pseudo d’artiste – s’est lancé dans une étonnante démarche artistique. Il colle directement dans les rues des séries de portraits d’inconnus pour tenter de faire rejaillir l’humanité qui les unit, et ce en dépit de leur différence de classe sociale et de pays. « Ce qui est amusant, c’est que je n’ai aucune maîtrise sur ce que les photos vont devenir, explique-t-il. Certains passants ne les remarquent pas, d’autres s’arrêtent pour regarder. Parfois, des personnes les récupèrent, ce qui me va très bien. »
Ne pas avoir peur.
Tout commence au Mexique en 2010, lorsqu’Adrien dégote son premier appareil argentique, un Rolleiflex de 1945. Il décide d’immortaliser chaque rencontre qui le touche sur son chemin en prenant un unique cliché qu’il ne découvrira que plus tard à son retour. « Je ne me suis jamais attardé sur les paysages, raconte le globe-trotter. Ce que je veux ramener, ce sont des émotions, des expressions, des attitudes, des gestes. »
En 2015, sa démarche s’accélère. Blessé lors de l’attentat du Bataclan – un épisode qu’il hésite d’abord à nous dévoiler, par crainte d’y être constamment associé – l’artiste refuse de s’enfermer dans la peur et l’animosité et poursuit son ouverture sur le monde. « Beaucoup de choses ont été dites. J’avais envie d’aller au-delà des amalgames et des préjugés. Je voulais continuer à rencontrer des gens, à échanger avec eux et à montrer qu’ils sont beaux et ont des choses à dire. »
Bientôt, une quinzaine de nouvelles installations devraient fleurir dans les Pentes. Puis Adrien mettra le cap sur la Thaïlande, le sac à dos rempli de pellicules vierges. « Je rêve d’aller un jour en Afghanistan, enchaîne-t-il. Ce qui est sûr, c’est que je ne suis pas près de m’arrêter. Toute ma vie est un voyage. »
Romain Desgrand
Bio Express
34 ans. Né à Lille, Adrien Nguyen est architecte de formation et vit à Lyon depuis un an. Il a réalisé ses premiers collages en 2011 à Rouen. Aujourd’hui, ses petites expositions composées d’au moins deux photos encadrées se découvrent principalement dans les rues des Pentes et du Vieux Lyon. Il n’a jamais vendu ses clichés.
instagram.com/adrien_nguyen_photo
Spot favori
La cour des Voraces (où il a collé des photos), pour son escalier monumental et la rue des Fantasques, pour sa vue sur la ville.