« Mon plus grand adversaire, c’est moi-même »
La Croix-Roussienne Coralie Brot participe cette semaine à la Coupe du monde d’escrime en Pologne. À seulement 23 ans, cette battante inspirante et fonceuse a su tirer une grande force des échecs et des revers de la vie. Portée par une rage de vaincre, elle ambitionne désormais de représenter la France aux JO de Tokyo en 2020.
Certaines rencontres vous touchent sans prévenir. Quand elle arrive dans un café du Plateau coiffée d’un bonnet style hip-hop, Coralie Brot fait d’abord penser à une ado comme les autres. Elle vient pourtant de quitter son club d’escrime lyonnais pour intégrer le très prestigieux Insep (Institut national du sport, de l’expertise et de la performance) à Paris. « C’était pour moi un énorme dilemme. J’envisageais de rester à la Croix-Rousse pour devenir pompier volontaire. J’ai réussi tous les tests sauf celui de la traction », explique-t-elle. Partie remise.
En attendant, elle a surpris tout le monde en gagnant le mois dernier le circuit national de Bordeaux après une blessure et sept mois sans compétition. « Même les coaches ne s’y attendaient pas. Mais moi, dans ma tête, je n’ai cessé de me répéter “Je gagne !” », confie-t-elle. La victoire lui a ouvert les portes de la Coupe du monde qui débute ce 11 janvier avant d’autres compétitions, notamment outre-Atlantique.
Cuirasse.
Mais son parcours est loin d’être parsemé de pétales de rose. Coralie a grandi à la Croix-Rousse entourée de sa mère, professeur de musique et de sa sœur jumelle, son père ayant, lui, préféré reconstruire sa vie ailleurs. « J’ai dû tout au plus le voir un ou deux mois d’affilée dans ma vie », lâche-t-elle, avouant que cette absence a contribué à renforcer sa cuirasse. Contrebassiste et footballeuse depuis l’enfance, elle a décliné deux offres de l’OL féminin. « Je préférais continuer à jouer avec les garçons. Il y a trop d’embrouilles avec les filles. » Elle se lance finalement dans l’escrime après avoir lu un flyer récupéré par sa mère et destiné, à l’origine, à sa sœur. « J’aime le fait de porter une arme, un uniforme. Dans l’escrime on est face à soi. Je suis mon plus grand adversaire. »
Sérieusement blessée au genou en 2013, Coralie a bien failli jeter l’éponge. « Plus personne ne croyait en moi. Mais avec l’aide d’un coach mental, j’ai retrouvé la force d’y croire et de voir chaque facette de ma vie sous une lueur positive. » Et celle qui, à ses débuts, avait fait sourire son maître d’armes en annonçant « un jour, je ferai les JO » pourrait bien voir son rêve se concrétiser l’année prochaine à Tokyo. « Je vais tout mettre en œuvre pour », prévient-elle.
Longtemps silencieuse derrière son masque, la Croix-Roussienne a appris à lâcher prise pour exprimer sa soif de victoire. « Pour certains fleurettistes, crier est naturel. Au début, j’avais un peu peur de donner de la voix même si à l’intérieur j’étais à 110 %. » Elle marque une pause, fixe l’horizon à l’extérieur avec son regard vert noisette et sourit. « Après la compétition de Bordeaux, je n’avais plus de voix. Je n’avais jamais autant crié. »
Romain Desgrand
Bio Express
23 ans. Avant de rejoindre l’Insep à Paris l’été dernier, Coralie était membre du Masque de fer, club d’escrime situé dans le 6e. Elle a toujours été encouragée par Nicolas Beaudan, son maître d’armes et « deuxième père ». Elle fait aujourd’hui partie du club de Rueil Malmaison.
Son spot favori
La place Flammarion où elle aime retrouver ses amis.