André Hermse, le plus ancien forain de la Croix-Rousse
Avec son manège Orly Baby, il fait voler les enfants dans ses petits avions depuis plus de 50 ans. André Hermse est l’une des mémoires vivantes de la Vogue des marrons. Il vient de recevoir la médaille du plus ancien forain de la Croix-Rousse.
C’est son bébé à lui. Depuis sa petite cabine où il tient les commandes, André Hermse – appelez-le « Dédé » – observe d’un air tendre et amusé ses douze avions s’élever du sol. « C’est parti jeunesse ! », clame-t-il dans son micro en appuyant sur l’interrupteur qui lance la machine. Les rires enfantins s’envolent. Il sourit.
Son manège, Orly Baby, situé sur la place de la Croix-Rousse, juste à la sortie du métro, accueille de génération en génération les bambins lyonnais. De telle sorte qu’il n’est pas rare que des riverains fassent un détour pour venir le saluer et prendre des nouvelles. Le maire du 4e et ses confrères forains viennent même de lui décerner une médaille. Oui, à la Croix-Rousse, Dédé est un symbole. Son visage évoque à lui seul les pommes d’amour, l’odeur sucrée de la barbe à papa et les prémisses de l’automne. Et qu’importent les râleurs qui chaque année s’offusquent du bruit provoqué par la vogue. « On a tous été enfant et on est tous monté dans un manège, peu importe qui l’on est », lâche André.
Tabou. Construits en 1959 à Angers, ces petits avions appartenaient auparavant à ses parents qui lui ont tout naturellement passé la main. « Ainsi va la vie ! », aime dire Dédé qui ne troquerait sa place pour rien au monde. Pourtant, « être forain, ce n’est pas toujours de la rigolade, explique-t-il. Cinq heures sportives et épuisantes sont nécessaires pour monter Orly Baby. Sans parler de l’entretien et du nettoyage quotidien. » Chaque soir, il rejoint sa caravane dans le 8e arrondissement, pour trouver repos. André refuse de dévoiler combien il gagne. Il en vit, c’est tout. Le sujet est tabou chez les forains.
Nomade. La Vogue des marrons s’annonce pour lui comme une douce entrée vers la trêve hivernale après une douzaine de fêtes foraines à travers le centre du pays. Quand la saison s’achèvera en novembre, il restera à Lyon quelques mois et en profitera pour faire quelques mâchons.
Au printemps, il faudra à nouveau prendre la route. Un jour Dédé, qui n’a pas d’enfant, passera le flambeau à l’un de ses neveux. Pour autant, pas question pour lui de se poser. « Je n’ai aucune envie de vivre dans une maison ou dans un appartement. Quel ennui ! » Il préfère de loin sa vie de bohème où il vagabonde de ville en ville dans lesquelles des amitiés se sont tissées au fil des années. En attendant la retraite, Dédé fait voler encore et toujours ses petits avions. « Quand on termine sa journée, on pense à tous ces rires d’enfants que l’on a fait éclater et on se sent comblé. »
Romain Desgrand
Bio express
70 ans. André Hermse est né à Auxerre. Fils de forains, il a grandi au milieu des manèges au rythme des fêtes foraines.
Son spot préféré
« Toute la Croix-Rousse est belle », estime-t-il.