Samia Boughattas : « être tapissière, c’est travailler pour l’avenir »
22 juin 2018
Tapissière décoratrice installée en haut des Pentes, Samia Boughattas propose cet été un stage pour apprendre à redonner vie aux fauteuils d’époque. Ici, le travail se fait à l’ancienne. Nous avons poussé la porte de son atelier.
Le temps paraît suspendu. Au 4 rue des Tables Claudiennes, une fois le palier franchit, l’agitation de la montée de la Grande Côte pourtant si proche, semble soudain un autre monde. Serait-ce les vieux fauteuils dégarnis en attente d’une seconde jeunesse qui ancre l’espace ailleurs ? Ou le rythme de travail particulier de Samia ?
« Ici, rien ne se fait dans l’urgence, explique-t-elle. C’est un métier de minutie, de patience. On passe plusieurs semaines sur une même pièce. Dans notre société où tout doit aller vite, c’est un formidable contre-pied. »
Installée sur son tabouret bas, Samia nous parle d’une voix douce et posée qui s’envole souvent en éclats de rire qu’elle offre sans compter. « Je rigole tellement pendant ma journée que j’ai souvent mal aux zygomatiques« , confie-t-elle. À l’aube de la cinquantaine, Samia rayonne d’une aisance magnétique. On pourrait rester des heures face à elle, à l’écouter évoquer ses multiplies vies qui l’on conduit à ouvrir son atelier il y a 13 ans.
Matières nobles. Originaire d’Auxerre et passionnée par l’histoire de l’art, elle a d’abord exercé comme libraire avant de suivre son instinct : exercer un métier manuel. « Le hasard a voulu qu’une tapissière s’installe face à ma librairie. Après une semaine passée à ses côtés, je savais ce que je voulais faire ».
Sa formation en poche, elle ouvre son atelier Assoyez-vous donc sur la colline et décide rapidement de partager sa passion pour le travail à l’ancienne. L’artisan utilise des matières nobles comme le crin végétal, de la fibre de palmier, pour sculpter les fauteuils à l’image d’un artiste qui façonne une oeuvre d’art.
En plus d’un stage estival, elle anime des cours tout au long de l’année pour donner aux participants l’opportunité de travailler leur propre projet et de découvrir toutes les exigences de ce métier, longtemps prédestiné aux hommes.
« C’est plus physique qu’on ne le pense. Il faut beaucoup de force pour tendre les toiles ». Une fois restauré, le fauteuil est reparti pour une cinquantaine d’années. « On travaille pour les générations suivantes. Ce dire qu’on laisse quelque chose derrière soi, c’est toujours émouvant. »
Romain Desgrand
Bio Express
49 ans, née en Tunisie
Cours tout au long de l’année. Stage du 23 au 27 juillet.
Son site : assoyezvousdonc.fr
Son spot préféré
« Impossible de choisir », insiste-t-elle. « J’aime marcher dans la ville surtout la nuit, pour capter sa vie et son énergie. »