Qui peut se loger à la Croix-Rousse aujourd’hui ?
Il y a 40 ans, plus d’un tiers de la population à la Croix-Rousse était ouvrière. Aujourd’hui, c’est le troisième quartier le plus riche de Lyon. Entre-temps, les coûts de l’immobilier n’ont cessé de grimper, des Pentes jusqu’au Plateau, presque au niveau de ceux du 6e et du 2e. Comment expliquer une telle ascension sociale et quel est le profil des Croix-Roussiens aujourd’hui ?
C’est le Montmartre de Lyon
Pour mémoire, l’urbanisation de ce secteur, à la fin du XIXe siècle, était liée à l’installation des canuts. En témoignent leurs anciens appartements qui servaient aussi d’ateliers, d’ailleurs très prisés aujourd’hui en tant qu’habitats de caractère. Ironie de l’histoire, la Croix-Rousse, c’est plutôt le secteur de Lyon où l’on travaille le moins : quelque 30 000 emplois recensés dans le 1er et le 4e arrondissement ! On y vit désormais, mais on n’y fait pas de business. Mais alors d’où vient l’attractivité immobilière galopante pour ce quartier qui compte de plus en plus de familles et dont 35 % des primo-accédants sont des jeunes ? « C’est le Montmartre de Lyon, explique Patrick Arnaud, directeur de Guy Hoquet Immobilier Lyon 4, le charme d’un village en ville, en surplomb, avec des espaces aérés, beaucoup d’écoles, des rues commerçantes animées par deux marchés alimentaires 6 j/7, des braderies, un marché de Noël, de nombreux restaurants… ».
Un quartier gentrifié
On compte aujourd’hui à la Croix-Rousse autant de cadres et d’intellectuels qu’il y avait d’ouvriers en 1975, et le revenu médian annuel des Croix-Roussiens dépasse les 20 000 euros. Un quartier de bobos, dirait-on, surtout si l’on considère qu’il concentre un nombre plus élevé qu’ailleurs de professions artistiques, notamment sur les Pentes. C’est aussi l’un des quartiers de la ville, avec le 6e arrondissement, où le taux de pauvreté est le plus faible et ce, malgré les efforts des élus locaux pour y maintenir une certaine mixité (la part des logements sociaux est inférieure à 20 %). Mais l’augmentation progressive des prix de l’immobilier dans ce secteur (jusqu’à 15 % de 2016 à 2017) ne s’explique pas uniquement par le profil aisé de sa population actuellement établie. Son attractivité croissante à l’extérieur y participe également alors qu’il s’agit d’un des quartiers les plus petits et les plus densément peuplés.
Valérie Maître-Latour